L'activiste Josephine Witt "être Femen fait partie de mon identité"

Fin mai Josephine Witt s'est dévêtu à Tunis afin de manifester pour la libération d'une défenseuse des droits des femmes. Elle a été arrêtée et a passé 29 jours en prison. Elle est maintenant de retour en Allemagne – et raconte sa détention, le déroulement de la manifestation nue + s'exprime sur les critiques faites aux Femen.
Josephine Witt, 20, Studentin der Philosophie in Hamburg. Das Foto entstand am 1. Juli 2013
Josephine Witt, 20 ans, étudiante en philosophie à Hambourg. La photo a été prise le 1er juillet 2013
DIE ZEIT: Frau Witt, comment allez-vous ?
Josephine Witt: Je suis soulagée mais encore sous le choc. Comme presque toutes les prisonnières, j'ai eu des problèmes de santé pendant la détention. La 2e semaine, j'ai fait une syncope. Je suis en traitement maintenant, également psychologique. Je vais bien, en comparaison. La Tunisienne Amina Tyler, contre l'arrestation de laquelle nous avons protesté, va très mal, elle. Elle est encore en prison, et je sais maintenant ce que cela signifie.

ZEIT: Comment avez-vous vécu la détention ?
Witt: Lors de notre arrestation, nous avons été battues, avons reçu des coups de pieds et été menacées. Il s'en est suivi une odyssée dans différentes prisons où nous avons dormi à même le sol. Il s'y trouvait du sang, de l'urine, du vomi. Plus tard, nous avons subi un examen médical que j'appellerais plutôt dommage corporel. À la fin nous nous sommes retrouvées avec 30 femmes dans une cellule. Nous n'avons pu nous doucher qu'une fois en 4 semaines, nous devions nous habiller comme des petites filles, je me suis retrouvée avec un pantalon rose et un T-shirt à motif de bandes dessinées. Au tribunal, on nous a voilées de force. Nous avons été en permanence humiliées. Cela détruit complètement. Quand je lis aujourd'hui comment le représentant des droits de la personne humaine, Markus Löning, banalise la prison, cela me met en rogne. Le gouvernement fédéral ne voulait surtout pas s'en mêler. Il ne nous restait plus qu'à espérer. Je hais l'espoir, maintenant. Il vous fait sentir combien vous êtes impuissante.
ZEIT: Vous avez d'abord été condamnées à 4 mois ferme. Lors du procès en appel, le semaine dernière, vous vous êtes excusées pour la manifestation nue et vous vous êtes retrouvées en liberté conditionnelle.
Witt: Non ce n'est pas vrai, ce que j'ai dit a été mal traduit. Nous étions contre le fait de nous excuser. La seule chose que je regrette c'est que les musulmans de Tunisie aient mal interprété notre action, c'est cela que j'ai dit au juge. Je savais que si je devais rester dans ce trou pendant 4 mois , je n'allais plus pouvoir être activiste politique. Je ne l'aurais pas supporté. Alors j'ai montré un peu de regret.
ZEIT: Qu'est-ce qui a déclenché votre action ?
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Witt: Amina nous a contactées lorsqu'elle a voulu fonder une antenne Femen en Tunisie. Nous savions qu'elle prenait un risque mais son courage nous a inspiré. A cette époque, j'ai skypé avec Amina presque tous les jours. Lorsqu'elle s'est fait arrêter, il a été clair pour nous que nous devions organiser une action de solidarité.
ZEIT: Comment se met sur pied une telle action?
Witt: Nous écoutons les conseils des soeurs Femen qui ont le plus d'expérience. Ce sont les fondatrices qui viennent d'Ukraine. Mais la décision de savoir si une manifestation aura lieu ou pas, est prise démocratiquement après des discussions de fond. Ce sont celles qui feront la manifestation qui ont le dernier mot.
ZEIT: Vous avez eu 20 ans en prison, vous n'êtes Femen que depuis février. N'était-ce pas irresponsable de la part du groupe de vous choisir pour cette action alors que vous étiez nouvelle ?
Witt: Je n'étais pas nouvelle. Il y a longtemps que je suis activiste, depuis longtemps féministe et j'ai beaucoup voyagé. J'étais en avril à la manifestation contre Vladimir Poutine à Hanovre. Je suis physiquement en très bonne condition. J'ai choisi librement de participer. Personne ne m'a dit : tu y vas.
ZEIT: Aviez-vous conscience des risques ?
Witt: On ne se rend pas là-bas les yeux fermés. Nous nous sommes longuement préparées et avons beaucoup parlé de la question. Notre grande peur était de nous faire enlevées par des islamistes radicaux. Nous nous sommes cependant plutôt attendues à être expulsées par la police.
ZEIT: Vous vivez encore chez vos parents. Les avez-vous informés de votre voyage ?
Witt: Mes parents savaient que j'allais en Tunisie. Ce que j'avais exactement l'intention d'y faire, je ne l'ai pas dit, pour les protéger. Ils se font, bien sûr,du souci pour moi, mais ils ne m'ont pas empêchée de partir. Mes parents se sont comportés de façon tout à fait adéquate, par rapport à tout ce qui s'est passé.


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